Only Human.

La poupée… Le jouet préféré des petites filles… Pourtant, on m’a jetée.

Je suis assise par terre, dans l’obscurité et la puanteur du vide ordure. Tu m’aimais, tu m’emportais partout avec toi, tu me coiffais, tu m’habillais, tu me parlais.

Mais un jour, tu as apporté une autre poupée, plus belle et plus neuve, tu t’es détournée de moi.

Je suis un jouet, je sais. Mais ma douleur est bien là. Mes lèvres murmurent ton nom. Mes mains cherchent les tiennes, à tâtons. Et si je ne suis faite que de porcelaine, et si mon sourire est figé, c’est intérieurement que je pleure.

Ma robe est toute déchirée, mes cheveux sont en bataille. Mais je continue de sourire. Jamais mon sourire ne s’affadira, tout comme mes joues resteront roses, mes lèvres rouges. L’horreur de ce monde me terrifie, mais on ne m’a pas fait de paupière : je suis condamnée à le contempler pour l’éternité.

Cette poupée délaissée qui comprend à présent que le monde, ce n’est pas la chambre bleue d’une petite fille. Que faire, quand tout autour de soi s’est écroulé ? Quand on est seul et perdu, et que la nuit tombe ? Toute la vie perd son sens, et on reconnait qu’elle n’en a finalement jamais eu.

La petite poupée remonta alors ses manches de dentelles, et sur cette peau de porcelaine blanche et lisse, et déposa délicatement un morceau de verre. Elle appuya de plus en plus… La porcelaine se fissura. La petite poupée s’allongea, sentant sa vie s’échapper, et contempla une dernière fois ce monde qu’elle quittait, ce vide ordure sale et hostile. Pas de sang pour cette mort, rien que de la souffrance : une mort propre.

Ainsi mourut Eva, petite poupée aux boucles blondes. La vie est aussi fragile que la porcelaine.